« Step one, you say we need to talk » || Elena

« Step one, you say we need to talk »

Where did I go wrong, I lost a friend
Somewhere along in the bitterness
And I would have stayed up with you all night
Had I known ...
__________ How to save a life

Ambre était couchée sur son lit, en chien de fusil. Elle n’avait pas la moindre idée de l’heure qu’il pouvait bien être, ayant perdu la notion du temps depuis qu’elle s’était couchée, ce qui lui semblait être il y a une éternité. Malgré le nombre de draps qui la couvraient, elle grelottait. Son oreiller était baigné par les larmes qui s’échappaient de sous ses paupières closes sans qu’elle s’en rende compte. Elle avait l’impression d’avoir perdu toute sensation, sans seulement savoir ce qui était la cause de son trouble. Cela lui paraissait des heures et des heures qu’elle s’était couchée, et pourtant elle ne parvenait pas à trouver le calme qui mène au sommeil. Elle aurait voulu se retourner car son corps commençait à se plaindre de cette immobilité forcée, mais elle n’y parvenait pas. Ses muscles ne répondaient apparemment pas aux ordres qui leur étaient envoyés. Ambre entendait au dehors les gouttes de pluie qui tombaient dans une berceuse régulière, et le vent qui fredonnait un air triste entre les branches des arbres, musique renforçant ce goût de nostalgie qu’elle sentait sur ses lèvres depuis trop longtemps… Elle avait tout pour être heureuse, ou du moins, telle était le conte qu’elle se servait constamment à elle-même pour essayer de se rassurer. Elle avait des amis, vivait dans le confort, mangeait à sa faim, et elle avait le plus précieux des cadeaux que le ciel peut donner à quelques rares élus : un amour plus fort que tout. Pourtant, elle ne l’était pas, heureuse, il lui manquait quelque chose pour être comblée, et elle savait pertinemment quoi. La jeune femme puisa dans ses dernières forces le courage de se retourner, elle était roulée en boule, face au mur, et elle pivota pour être face à la chambre. Ouvrant difficilement les yeux, il lui fallu quelques instants pour que sa vue troublée par les larmes cesse de trembler.

A quelques mètres d’elle, preuve vivante de la souffrance qui alourdissait le cœur de la jeune humaine, le lit d’Elena. Du moins, celui dans lequel elle dormait quand elle était encore une mortelle. Ambre et Elena partageaient cette grande chambre, et maintenant que l’une d’elles avait rejoint les rangs des vampires, l’autre devait vivre dans cet espace trop grand pour sa seule présence, et qui s’évertuait à lui rappeler l’absence de celle qui avait toujours été sa seule attache. Depuis bien des années, Miss Turner savait que son amie pouvait aller n’importe où, elle la suivrait, car même en enfer, avec Lena à ses côtés, elle y serait chez elle. Désormais, ici à Warrens, elle avait trouvé une deuxième raison de vivre, une deuxième personne qui lui donnait la force de se lever chaque matin, et cette personne était Duncan. Malgré cela, elle avait beau l’aimer à la folie, il ne pourrait jamais prendre la place de celle qu’Ambre considérait et considérera toujours comme sa sœur. Elle savait que le clan de Declan, duquel elle Lena faisait désormais partie, ne toucherait pas aux humains, alors pourquoi devait-elle éviter Elena ? La fragile mortelle était bien loin d’imaginer à quel point la soif chez les nouveau-nés pouvait être dévorante. Comme une certitude au fond d’elle-même, comme si c’était gravé dans les étoiles, elle savait que sa meilleure amie ne pourrait jamais lui faire de mal. Devoir vivre sans pouvoir pleurer dans les bras d’Elena, sans son sourire rassurant, sans cet éclat dans ses pupilles quand elle avait une idée, sans son rire léger qui sonnait comme une délivrance dans les moments durs, tout ça était impossible. Ambre aurait préféré vivre sans oxygène que sans son amie à ses côtés. Rares sont les gens qui représentent le monde entier pour vous, mais Amy aurait été prête à donner la terre pour seulement deux personnes au monde, et elle était prête à tout pour ne pas avoir à se séparer d’eux.

Quand cette pensée sonna dans son cerveau, elle eut l’impression que son corps revenait à la vie après un long coma. A nouveau, elle perçut toutes les sensations physiques qui l’entouraient : l’engourdissement de ses chevilles, la douceur de sa couette, l’humidité de son oreiller. Une décharge l’électrisa, et elle reprit subitement possession de ses membres, et de l’ambition qui lui avait fait défaut ces derniers temps. Elle se leva d’un bond. Si Lena ne voulait pas venir à elle, alors elle irait la trouver. La seule issue possible était de mettre fin à cette souffrance constante que représentait le doute. En vérité, elle avait peur. Peur que la nouvelle vampire oublie sa vie d’humaine, et celle qui l’avait toujours soutenue, envers et contre tout. Peur de n’être qu’un vague souvenir dans la mémoire de Miss Whisthler, de n’être qu’une image sur la rétine, de n’être qu’un passé, sans avoir l’occasion d’être un présent. Ses pieds nus s’enfoncèrent dans l’épaisse moquette, et bien qu’elle soit moins couverte depuis qu’elle était sortie des draps, le froid qui l’assaillait s’en était allé, remplacé par une tiédeur bienvenue. Vêtue simplement d’un bas de survêtement et d’un tee-shirt à longues manches, elle jeta un dernier coup d’œil derrière son épaule, où les deux lits désormais vides laissaient des ombres inquiétantes derrière eux, et sortit de la pièce en fermant doucement la porte derrière elle. Tout en traversant l’aile réservée aux humains, elle réfléchit au fait qu’elle ne savait absolument pas où pouvait être Elena. A quoi un vampire pouvait bien passer la nuit ? Ambre médita là-dessus avant d’interrompre elle-même le cours de ses pensées. Cette question n’était pas la bonne. La seule à laquelle une réponse était nécessaire était : A quoi Lena pouvait bien passer la nuit quand dormir n’était plus dans ses capacités ? Ce fut plus fructueux, car la jolie brune su directement où chercher. Elle priait pour que son amie ne soit pas dans sa chambre, ou dans l’aile réservée à son clan, car alors Ambre ne pourrait pas l’y rejoindre. Une fois ces endroits éliminés de la liste, il en restait encore pas mal, mais déjà moins. Sa première destination fut comme une évidence. Elle traversa l’annexe sans se soucier de se cogner dans bien des murs à cause de l’obscurité, ou du fait que les dalles froides lui congelaient les pieds. Seule une chose résonnait dans son cerveau : Elena. En arrivant près de la salle de musique, Ambre comprit qu’elle ne trouverait pas celle qu’elle cherchait ici. Si c’avait été le cas, les notes que jouerait la demoiselle empliraient le couloir de la douce mélodie qu’elles représentaient. Cependant, le silence était tranchant, preuve tangible que nul n’avait eu dans l’idée de se rendre dans la salle de musique. Un sentiment au gout amer emplit le cœur de la petite humaine, qui battait trop vite, faute à sa course effrénée dans les couloirs. Malgré tout, ne voulant pas s’avouer vaincue, elle poussa la porte, espérant découvrir là quelque chose, n’importe quoi, un indice… Elle ne savait pas bien à quoi elle s’attendait, mais le spectacle de la pièce vide lui fit mal. Bien qu’elle sache qu’Elena avait un piano pour elle seule dans sa chambre personnelle, elle avait espéré la voir ici, où elle passait son temps quelques mois auparavant. Ambre fit quelques pas à l’intérieur, et poussa un soupir qui se noya dans un sanglot. Retenir ses pleurs devenait de plus en plus dur, et pouvoir enfin se laisser aller sans personne dans les environs pour assister à ça était la plus belle des occasions pour fondre en larmes. Elle se le permit sans retenue, et tandis qu’elle titubait vers le fauteuil le plus proche avant de s’y affaler, elles coulaient sur ses joues et roulaient dans son cou. Elle ramena ses genoux sous son menton, et la crise de larmes, due à de si nombreuses raisons, fut salvatrice. L’absence d’Elena, le mal du pays, l’enfermement, tout ça en était trop, mais après avoir pu se soulager de ce poids, son cœur se trouva d’un coup plus léger. Au fur et à mesure que ses sanglots s’espaçaient, et prenaient fin, et que les larmes sur son visage séchaient, elle reprit une respiration calme et leva la tête. Face à elle, la lune éclairait de sa pâle clarté le paysage qui s’offrait à sa vue par la baie vitrée. Ce fut à cet instant que le déclic se produisit : la lune…

Sans prendre le temps de se ressaisir, elle sauta sur ses pieds, et se mit à courir dans les couloirs comme si sa vie en dépendait. Le bruit de ses pieds sur le carrelage lançait son échos infini dans la quiétude de la nuit et au prix d’un effort énorme, elle rejoignit la véranda en à peine quelques minutes. En approchant de là, elle ralentit, son marathon se faisant promenade, bien que sa respiration saccadée la dénonce. Ambre se rappelait de leur première nuit ici… Alors que toutes deux se sentaient si mal ici, et n’arrivaient pas à fermer l’œil, elles s’étaient levées et s’étaient mutuellement réconfortées en marchant à travers l’annexe. Elles étaient tombées sur la véranda, et la pleine lune éclairait l’endroit. « Regarde, avait soufflé Ambre, c’est la même que chez nous. » Depuis lors, elles avaient pour habitude de venir ici pendant les nuits d’insomnies, et la simple vue de cet astre au dessus d’elles avait tendance à leur réchauffer le cœur. La jeune fille, les joues encore humides d’avoir tant pleuré entra dans la véranda, le cœur battant. La silhouette qui lui tournait le dos était reconnaissable entre toutes, et Ambre s’approcha doucement sans savoir que faire ou dire. Elena restait immobile, pourtant consciente de la présence de son amie derrière elle. Arrivée à sa hauteur, tout près de la vitre, elles observèrent la vue un long moment, avant qu’Ambre prenne la parole, et tout ce qu’elle réussit à dire, dans un chuchotement presque imperceptible, fut :

- Elena…

Les jours d’hiver, la nuit apparaît très rapidement, laissant le tout petit soleil se couché avec peu d’éclats. Le froid prend alors encore plus d’importance d’autant plus que l’heure passe et passe. Les fenêtres deviennent peu visibles à cause de la buée qui se forme à la différence du froid de dehors et de la chaleur émise à l’intérieur par les radiateurs. Dans ce genre de nuit, vous aviez juste envie de bien au chaud, que ce soit sous une épaisse couverture, où sous une bonne douche chaude. Rien que le fait de réchauffer votre corps refroidit vous apporte que du bien. Et puis, au moment de vous couchez, vous êtes bien content de retrouver ses draps si doux et reposant que la chaleur vous embarque rapidement. D’un sommeil très léger, vous continuez à regarder les fenêtres givrées alors que vous, vous êtes bien au chaud. Et bien, c’est ce que se disait Elena à ce moment précis. Evidement, avant elle adorait aussi cette sensation que lui procurait une bonne couverture chaude la nuit, hélas maintenant, tout avait changé. Les nuits froides étaient devenues des nuits quelconques. Les capacités vampiriques lui avaient tout enlevés, toutes sensations de son corps, que ce soit le froid ou le chaud. Par principe elle se couvrait toujours autant pour ne pas montrer sa différence, mais qu’elle se promène en débardeur ou gros pull cela ne changerai absolument rien. Non, absolument rien, et pourtant cela avait un dure impact sur le moral de la jeune femme. Parce que oui, elle n’acceptait toujours pas sa brutale transformation et ses nouvelles capacités, et à chaque fois qu’une d’entre elles se manifestaient, cela la minait encore plus. Elena était bien bas dans son humeur ; elle ne souriait plus, ne cherchait plus à rentrer en contact avec quiconque. La brunette s’était perdue en chemin, s’était échappée du droit chemin. Tant de choses lui venaient à l’esprit, tant de choses qu’elle ne voulait pas penser. Elle s’en était remise à douter sur elle-même, sur ses propres convictions, sur les personnes qui l’entouraient, mais essentiellement sur Ambre. Ne la voyant plus, Elena l’apercevait toujours souriante auprès de Duncan et en était heureuse pour elle, cependant, éprouvait une certaine jalousie envers celle-ci. Une jalousie passagère puisqu’elle effaçait à chaque fois cette sensation dès qu’elle y penser. C’était impossible d’être jalouse d’elle, de celle qui toute votre vie vous a soutenu et épaulé, celle qui a tout traversé avec vous, celle qui vous a rendu bien de nombreux sourire dans vos larmes, celle qui maintenant et depuis toujours fait partie de votre famille. Non, réellement impossible, et c’est avec ce sentiment, qu’Elena avait l’impression de n’être plus soi-même. Vivre comme ça, elle ne pouvait pas. Parfois il lui arrivait de penser que mourir était mieux que de vivre cette nouvelle vie, mais tuer un vampire est si compliqué…

Les nuits étaient devenues un véritable cauchemar pour la jeune femme. Un moment où les questions revenaient aussi rapidement mais restaient ancrées longtemps, un moment de véritable solitude, étant donnée que les Vampires restaient éveillés, et pour l’instant son clan, elle ne l’acceptait pas, du moins…ils ne voulaient pas d’elle, à quelques exceptions près. Ayant pris l’habitude de jouer la plupart des nuits, on entendait souvent sa magnifique voix résonner dans toute l’annexe. Mais cette nuit, elle n’en fit rien. La jeune femme essaya de trouver une autre occupation, pour une fois, histoire de ne pas trop réfléchir. L’horloge du salon principal de l’aile Ouest affichait déjà 23h20, une heure très tôt pour les êtres immortels. Elena était rentrée avec crainte pour une fois, n’ayant réellement pas la force d’affronter qui que ce soit de son clan, mais finalement parut soulagée lorsqu’elle franchit la porte et aperçu que la salle était vide. Regardant autour d’elle, la jeune vampire trouva finalement son occupation : un bon film. S’approchant de la bibliothèque des DVD, parce que oui, il en avait tellement, elle commença à choisir son futur film avec soin. Mais son choix s’arrêta sur l’un des films cultes pour elle : Sex intention. Un magnifique film d’après elle, qu’elle avait déjà vu une dizaine de fois. Une fois l’allumage fait, elle s’installa confortablement dans le canapé d’en face et se recouvrit d’une couverture. Dès lors, elle fût captivée toute la durée du film, souriant à certain moment lorsqu’elle remarquait qu’elle le connaissait par cœur. La jeune femme ne remarqua même pas que quelques membres étaient passés en coup vent mais s’était ravisés lorsqu’ils avaient aperçu la jeune femme, certainement voulant la laisser en paix pour une fois. Notamment Declan, qui rentra en plein milieu du film, pour récupérer un objet qu’il avait laisser sur la grande table, était resté quelques minutes sur le pas du seuil à la contempler dans son monde. A la fin du film, la musicienne s’étira un peu, et se leva. Une fois tout éteints, il n’était que qu’1h05. La jeune femme ne pu s’empêcher de soupirer, voyant le nombre d’heure qu’il restait avant le levé du jour.

D’un pas déterminé, elle se dirigea vers sa chambre et pris finalement une veste, juste histoire d’être couverte, même si cela ne servait à rien. Une petite promenade ne lui ferait pas de mal, après tout, non ? Elle s’était tout d’abord promener dans son aile, et regardant certains membres de son clan s’animer dans leur chambre, elle s’était arrêté devant une porte entre ouverte et aperçu plusieurs de ses camarades en train de parler, de rire. Cela lui brisa le cœur, parce qu’une fois de plus, elle constata qu’elle était seule. Seul Mathew, un vampire de son clan qui l’accepte remarqua sa présence, mais avant même d’intervenir, elle était déjà partie. Comment leur en vouloir ? Ne pas accepter une inconnue ? Tout était normale, et elle en faisait de même. Comment leur en vouloir de la laisser dans son coin, alors qu’elle-même s’éloignait ? Il fallait que tout change, mais en avait-elle réellement la force ? La seule personne qui pouvait l’encourager s’était elle-même éloignée d’elle. Ambre, Ambre…Des larmes s’échappèrent doucement de ses yeux pour finalement rouler sur ses joues froides. A chaque fois qu’elle osait penser à elle, elle ne pouvait s’empêcher d’être dans cet état. Et pour cause, elle aurait tout donné pour elle, sa propre vie aurait suffit si elle pouvait la sauver, elle…mais, c’était complètement l’inverse, et en ce jour, la jeune femme doutait réellement des ambitions de l’humaine. Et puis, elle ne pouvait l’approché, sa soif devenait plus importante en présence des mortels, en présence d’Ambre. Ne voulant aucunement lui faire du mal et ayant peur de perdre le contrôle d’elle-même, elle n’avait osé s’approcher d’elle. Continuant à marcher dans l’annexe, elle avait évité l’aile centrale, et était atterrit dans l’espace commun. S’y aventurant elle passa devant la salle de musique mais ne s’y attarda pas, beaucoup trop de souvenirs dedans. Elle se souvenait des moments passés avec sa meilleure amie, lorsqu’elle jouait pour elle. Puis, Elena finit par arriver devant la véranda, un endroit culte pour les deux jeunes femmes. Etait-ce son cœur qui l’avait amener ici ? Elle n’en était pas certaine, cependant, puisque la vampire était là, autant y rester.

La véranda était très grande, d’une blancheur écarlate. Y était nombreux les plantes qui mettait un peu de vie dans cette endroit. Mais si, Ambre et Elena venaient si souvent ici, c’était pour son toit transparent, afin d’admirer la lune, qui d’après l’humaine, était comme chez elles. A cette pensée, Elena sourit gentiment et s’installa dans un de ses fauteuils afin de rester tête renversée à l’observer et repenser à des années doctes. Soudai, elle ressentit une sensation bizarre, une résonance dans sa tête. Quelqu’un l’appelait d’une voix si forte, si désespérée. Plus la personne s’approchait, plus elle pouvait distinguer ses pensées, sa volonté si forte de la retrouver. Et une fois qu’elle fût à la bonne distance, Elena ne pu reconnaître la voix d’Ambre. Elena se leva d’un bond, et regarda la porte d’entrée. La voix s’accentua de plus en plus rapidement, rendant presque la tête du jeune vampire comme une énorme machine en marche. L’humaine devait courir, et avec sa puissance, amplifiait rapidement le volume de cette voix. La jeune brunette en était certaine, elle allait bientôt arrivé, et dans son élan d’inquiétude de sa soif, bien qu’elle eu manger quelques heures auparavant, elle hésita à partir. Puis se mordant la lèvre, elle s’était retournée, dos face à la porte, continuant à regarder la lune.
Puis, Ambre arriva, presque essoufflée dans la salle et quelques instants plus tard l’avait rejoints à son niveau. En entendant sa voix et la voyant, Elena ne pu s’empêcher de continuer ce qu’elle faisait si bien en ce moment : pleurer.

La véranda, grande et déserte, donnait une impression de calme reposante. C’était un endroit hors du temps, la nuit, et Ambre l’appréciait pour cela, car les minutes ne s’y écoulaient pas de la même manière. A son arrivée, la jeune femme vivait chaque seconde comme une aiguille enfoncée dans sa peau, mais quand elle se rendait ici, à la tombée de la nuit, tout était gracieux, et le tic-tac de l’horloge dans sa tête se métamorphosait en le bruit serein du sablier. Le clair de lune éclairait la vallée face à elles, et la forêt quelques mètres en contrebas de cette pâleur si pure. En observant pareil tableau, Ambre n’osait pas cligner les yeux de peur de perdre une seule miette de la vue, qui était trop magnifique pour perdurer. Et pourtant, chaque nuit, ce petit bout de perfection sur terre refaisait son apparition. C’est ce qui la faisait avancer. Se dire qu’aussi décevante, affreuse ou terrifiante a été la journée, la nuit arrivera toujours, et apportera avec elle son lot de bonheur quotidien. Après avoir prononcé le prénom de son amie, d’un ton qui tenait trop du S.O.S., Miss Turner retint sa respiration. Le sentiment de peur qui s’était emparé d’elle avait persisté, mais contrairement à ce qu’on pourrait croire, ce n’était pas du tout le danger qu’un humain peut courir en présence d’un vampire nouveau-né qui l’effrayait, mais que son amie ait changé d’avis à son égard, et ait oublié que c’était Ambre et personne d’autre qui l’avait soutenue, depuis ses 6 ans, dans tous les moments difficiles, et qu’Elena lui avait rendu la pareille. Elles n’avaient pas traversés que des moments agréables, mais elles étaient restées unies, seuls piliers dans leurs vies. Les parents d’Ambre s’étaient séparés, sa mère était partie, les parents de Lena étaient morts, Raphaël, leur meilleur ami aussi, mais une seule chose était demeurée intacte depuis tout ce temps : leur amitié. Rien ne pouvait les séparer, et l’humaine en était persuadée, même pas une transformation. Elles pouvaient avoir des hauts et des bas, mais resteraient soudées, c’était écrit.

Ambre quitta un instant le paysage du regard, et son œil effectua la mise au point pour voir autre chose sur cette même vitre : elles-mêmes. Alors qu’une fraction de seconde plus tôt elle admirait la nuit Islandaise, la seule chose qu’elle voyait désormais était leurs propres reflets. L’humaine avait les joues encore humides et les yeux rougis et brillants des larmes qui y avaient pris naissance quelques instants plus tôt. Son teint était blême, addition de la tristesse, la nostalgie et le manque de sommeil, mais ses joues rouges témoignaient de sa course. Pourtant, ce qui la frappait le plus était Elena. Elle avait tellement changé depuis sa transformation… Ses traits si fins et avenants étaient restés intacts, mais étrangement, elle semblait métamorphosée. Ambre avait beau ne pas être habituée à son teint si pâle, et pourtant si parfait, ou à son regard qui n’était plus le même, elle se rendit compte que ce qui était le plus différent chez son amie était le sourire. Ce sourire, parfois joyeux, parfois contrit qui voletait toujours sur les lèvres de Lena, même lorsque les choses semblaient s’écrouler sur elles, n’était plus. Les émotions qui passaient sur le beau visage de Miss Whisthler étaient bien étrangères à Ambre, comme un mélange de regrets et de solitude, une expression que son amie n’avait jamais arborée avant que cette fameuse nuit où tout changea ait eu lieu. Elle n’examina leurs doubles dans la vitre que quelques secondes, et un éclat sur celui de sa meilleure amie attira son attention ; une larme… Une simple goutte qui perla sur les cils d’Elena, et glissa le long de sa joue parfaite. Ambre ne réfléchit pas aux conséquences, elle fit la chose la plus évidente quand votre sœur pleure : elle la prit dans ses bras. La belle immortelle étant plus grand qu’elle, elle se hissa sur la pointe des pieds, et l’enlaça. Ses propres larmes qui ne s’étaient taries que pour quelques minutes reprirent du service et glissèrent le long de son nez jusqu’à l’épaule d’Elena. Cette dernière avait la peau si froide qu’Ambre eut un petit frisson. Pourtant, elle avait l’habitude de fréquenter les vampires, et les contacts physique avec eux avaient cessés de la surprendre depuis qu’elle était amoureuse de l’un d’eux, mais c’était la première fois qu’elle touchait son amie depuis que celle-ci était devenue immortelle, et que cette fraîcheur s’échappe de sa peau à elle était étrange. Elle avait tant de fois pris son amie dans ses bras par le passé, c’était la seule manière efficace de se réconforter, et elles en avaient eu besoin plus que quiconque.

Ne me laisse pas, s’il te plait,

souffla Ambre d’une voix faible entrecoupée de sanglots.

Je ne peux pas tenir le coup sans toi…

Une vague de souvenirs lui revinrent en tête, et contrairement à ceux qui apparaissaient quand elle pensait à Elena, ce n’était pas ceux de leur enfance. Elle se souvenait de ce matin si insoutenable, à son réveil, quand en se retournant dans son lit, et avait constaté que celui de son amie était vide, elle avait compris que quelque chose de terriblement capital avait changé. Plusieurs jours s’étaient écoulés sans qu’elle la voie, et aux regards que lui lançaient les vampires, sans vraiment savoir pourquoi, elle avait compris. La semaine qui suivit fut si horrible, si dépourvue de toute sensation autre que la solitude qu’elle avait cru qu’elle en mourrait. Mais Duncan l’avait aidé à surmonter ça et depuis elle lui en était reconnaissante. S’il n’avait pas été là, Dieu seul sait dans quel état ce serait retrouvé la petite brune après coup. Après avoir cherché par tous les moyens, mais en vain, de voir Elena, pleurer sur son épaule, et apprendre enfin ce qui s’était passé dans les moindres détails, elle s’était rendue compte que cette dernière faisait tout pour l’éviter, à juste titre. De son côté, Ambre nourrissait quelques craintes envers le nouveau statut de son amie, tout en sachant qu’elle ne pourrait pas se passer de sa présence. Finalement, c’était Duncan et les autres vampires de son clan qui avaient expliqué la véritable histoire à la jeune mortelle, dépitée. Depuis, elle n’avait pas pu parler une seule fois à Elena, car elles ne se croisaient jamais, et ce n’était pas le hasard qui en était la raison. Elle ignorait encore tant de chose sur la nouvelle naissance de Lena. De plus, les choses étaient tellement étranges désormais… Mais ce soir, elle n’avait pas tenu, elle avait craqué, et malgré la froideur inconnue de la jeune vampire, elle restait sa sœur de cœur, et le soulagement l’envahit qu’elle soit demeurée la même.

Les larmes ne cessaient de rouler sur la joue douce d’Elena. C’était une chose inimaginable pour un vampire de pleurer. Ils se devaient d’être fort, supportant chaque coup dur, chaque dépression. Même d’ordinaire, Elena était forte, et arrivait à retenir n’importe quelles larmes tant qu’elle était accompagnée. Néanmoins, étant un nouveau né très instable, Elena ne pouvait se reconnaître, et toutes seules, sa tristesse se laissait très vite apercevoir grâce à ses chaudes perles qui survenaient très souvent. La jeune femme n’arrivait pas à contenir toutes ses émotions à la fois si étrange et quotidienne maintenant. Ayant toujours l’impression qu’une toute petite sensation pouvait s’amplifier à n’importe quel moment, la jeune vampire ne pouvait réellement prévoir ses changements d’humeurs. Il lui arrivait de se sentir apaiser, généralement lorsqu’elle jouait du piano, et tout à coup émergée par la colère, lorsqu’elle apercevait l’un de son camps. Les seuls vampires qui pouvaient l’approcher et la voir telle qu’elle est sont réduits presque à néant. Il ne reste que la merveilleuse January, qui dès qu’Elena l’approche, ne peut ressentir qu’un profond respect envers cette femme. Et depuis peu, cette dernière est devenue un pilier très important pour la musicienne, puisque January est devenue comme une mentor qui lui apprends comment se sentir, se tenir pour mieux remonter la pente ; elle la rassure, lui montre le chemin qu’elle doit prendre. En ces jours, cette présence lui ai indispensable.
Fermant les yeux, Elena essayait de se contenir, ses poings presque refermés prêt transpercer sa peau s’il le fallait. Levant la tête au ciel, elle soupira longuement avant de replonger ses yeux sur la lune. Ne pouvant la regarder en face, elle évitait à tout prix son regard, pour ne pas recommencer à fondre en larme. Et d’un seul coup, sans prévenir, Amber fit exactement ce qu’Elena avait pensé qu’elle allait faire si elle l’a voyait pleurer. Mais essayant de s’en dissuader, elle avait pensé que finalement tout avait changé. Seulement, encore une fois, la jeune femme était dans le faux. Son amie, ayant tourné la tête vers elle, s’était empressée de l’enlacer pour mieux la réconforter. Au départ, la jeune brunette ne su quoi faire, si elle devait la repousser ou l’enlacer elle aussi. Ses bras étaient toujours tendues le long de son corps, et voyant que la jeune femme, elle aussi, commençait à pleurer, elle ne pu s’empêcher de lui rendre ce qu’elle attendait tant, bien qu’hésitante. Mais finalement ses embrassades se terminèrent en un enchaînement de sanglots de la part des deux meilleures amies. Etait-ce parce qu’elles ne s’était pas approchée depuis des mois ? Etait-ce par leur manque affectif ? Ou était-ce par leur regret du passé ? La vampire était sceptique sur la raison de ses pleures, mais ils devaient être réelles. Lorsque Amber lui avoua ses réelles intentions, qu’elle ne voulait pas qu’elle la laisse, une nouvelle vague de tristesse et de désespoir commencèrent à remonter du plus profond d’elle. Mais, bizarrement, une joie l’empara aussitôt. Mais pourquoi était-elle heureuse à ce moment là ? Ce fût un soulagement pour elle, de savoir qu’Amber ne l’avait pas oublié, qu’elle pouvait être à ses côtés, du moins pour le moment, parce que l’éternité allait bientôt sûrement les séparées à nouveau.
Elena ne su quoi ajouter à sa demande. Sa meilleure amie était en face d’elle, et avait résumait ce qu’elle-même ressentait. Mais, toujours remplie de toutes, elle se devait de la repousser pour son bien, avant qu’il ne soit trop tard, avant commence à sentir les effets qu’elle détestait. Son cœur voulait absolument rester aux près d’elle, mais sa raison le lui interdisait…

« Amber… » Dit-elle en se calmant doucement. « Tu connais les risques…Je ne peux pas… »

A contrecœur, elle hésita à lui dire des choses qu’elle pouvait regretter dans le seul but de la faire fuir au plus vite, même si elle n’en penser pas un mot. Elena se devait de la protéger, se devait de la garder en vie, essayant de la sauver d’elle-même. Voyant qu’elle était devenue un monstre, la jeune femme depuis sa renaissance ne s’était pas encore montrée faible du côté de la soif, juste parce qu’elle avait résister à l’envie de les approcher. Mais maintenant, tout était différent, elle était si proche…elle pouvait l’attraper en une fraction de secondes et la vider de son sang aussi rapidement. Elena remplit son esprit des différentes morts d’Amber. Son côté vampirique était en train de prendre le dessus, et elle ne pouvait y résister. * Non, pas maintenant ! Pas avec elle ! * se disait Elena en boucle. Par réflexe, La jeune femme saisit les épaules de sa meilleure amie et se sépara d’elle, tout en bondissant de l’autre côté de la pièce.

« S’il te plait, Ambre. Pars, aussi loin, aussi rapidement ! » ajouta-t-elle en se recroquevillant sur elle-même.

Elle essayait de se contenir, de renfermer ses sentiments qui prenaient doucement le dessus. Son odeur devenait comme un délicieux supplice, un dangereux attrapes qui pouvait séduire n’importe quel vampire. La jeune femme se demandait réellement comme Duncan arrivait à se maîtriser, elle avait une si bonne odeur…Se mettant sur ses gardes, ses yeux commencèrent à virer aux jaunes, sans qu’elle ne puisse rien faire. Ses crocs se glissèrent lentement contre la volonté de la jeune femme. Se sentant réellement impuissante face à cette situation, Elena ne pu s’imaginer sauter sur elle, et pourtant c’est ce qui risquait d’arriver si elle ne faisait rien, tant qu’elle était mettre de son corps…

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